Reine des prés, bien plus qu’une super aspirine végétale !

  1. Description botanique (à découvrir en vidéo)

Ulmaire, herbes aux abeilles, barbe de chèvres, grande potentille ou encore belle des prés, la reine des prés a quasiment autant de noms que de propriétés.

Dénomination botanique :  Filipendula ulmaria, (Spiraea ulmaria)

Elle appartient à la famille des rosacées.

Elle affectionne les sols humides. On le rencontre communément dans les marais, le long des cours d’eau, dans des prairies inondables, dans des fossés. Elle est présente dans l’hexagone jusqu’à 1700m d’altitude en dehors du pourtour méditerranéen trop sec. Cette plante pousse en Europe, en Amérique du Nord et en Asie dans les zones tempérées.

Plante herbacée, vivace et mellifère, elle peut atteindre les 2 m de haut. Son rhizome est traçant. Elle pousse donc en colonie. Sa tige est anguleuse, creuse et rougeâtre. Les feuilles caractéristiques sont grandes, alternes et imparipennées. Elles sont organisées en plusieurs folioles dentelées et de tailles différentes. La foliole terminale, est palmée en 3 ou 5 parties. Les autres folioles sont au nombre de 2 à 5 paires le long du pétiole.

La tige, dans sa partie haute, se divise en plusieurs rameaux floraux composés de boutons floraux, puis de multiples petites fleurs de couleur blanche jaunâtre à l’odeur fort agréable, de mai à septembre. Puis celles-ci laisseront place aux akènes (fruits) en forme de spirale (lui conférant son nom) renferment des graines brunes.

Les sommités fleuries sont utilisées pour leurs nombreuses propriétés médicinales.

2. Un peu d’Histoire

De l’Antiquité à la Renaissance, la Reine des Prés était connue pour ces propriétés fébrifuges et antalgiques. Puis elle fut mise en concurrence avec l’écorce de saule contenant aussi du salicylate. Au XIXe siècle, le saule vaincu la Reine des Prés. En effet, la saliciline du saule fut isolée, aboutissant à la synthèse de l’acide acétylsalicylique. Cette molécule de synthèse est plus connue sous le nom d’aspirine avec le « a » pour acétyl et « spir » pour spirée en référence à la Reine des Prés dont les fruits sont spiralés (Spireae ulmaria). La bataille contre le saule ne fut donc pas complètement perdue puisque la Reine des Prés inspira le nom de l’aspirine. Une belle revanche pour la fleur aux abeilles.

3. Cueillette et culture

Semer et faire germer la Reine des Prés n’est pas chose aisée. Par contre il est possible de la cultiver chez soi en prélevant une plantule dans la nature au printemps. Elle apprécie la mi-ombre ou le soleil et un sol humide et riche. Si vous habitez dans le sud, il faudra la planter à l’ombre. L’arrosage sera régulier. 

En pleine nature, la cueillette se fait en juin juillet, quand les fleurs commencent à s’ouvrir. Bien que la plante soit abondante dans les zones humides, il faut la préserver et ne pas cueillir à outrance (maxi ¼ de la plante).

4. Composition des sommités fleuries

La composition est très riche avec plus de 119 composés. Citons par exemple :

  • Tanins hydrolysables (10 à 20%) : ellagique, gallique responsables de l’astringence.
  • Flavonoïdes type flavonol (1 à 5%) : hétérosides de quercétol et du kaempférol.
  • Hétérosides phénoliques simples (0.3 à 0.5%) : monotropitoside, spiraéine (primevérosides de dérivés salicylés)
  • Terpénoïdes : triterpènes
  • L’huile essentielle en faible quantité est riche en aldéhyde salicylique et salicylate de méthyle.

La qualité du séchage est indispensable pour préserver et libérer les composés phénoliques (aldéhyde salicylique et salicylate de méthyle, alcools phényléthyliques, benzylique…)

5. Propriétés pharmacologiques des sommités fleuries

  • Anti-inflammatoires et gastroprotectrices. Pour information, les salicosides de la Reine des Prés seront transformés après absorption en acide salicylique et non en acide acétylsalicylique. Il en résulte qu’elle n’a pas les effets indésirables de l’aspirine tout en possédant les mêmes propriétés anti-inflammatoires, antalgiques et anti agrégantes.
  • Anti ulcéreuses
  • Antirhumatismales
  • Immunomodulantes
  • Anticoagulantes
  • Astringentes
  • Diurétiques uricolytiques
  • Antioxydantes et cytoprotectrices
  • Anti tumorales
  • Antibactériennes (Staphylocoque doré, colibacille, bactéries Gram (-) et (+)
  1. Indications

Douleurs rhumatismales, poussées inflammatoires ostéo-articulaires (arthrose, rhumatisme inflammatoire, arthrite microcristalline : goutte, chondrocalcinose)

Inflammations tendineuses et périarticulaires : tendinopathie, aponévrosite, bursite, tendinopathie calcifiante

Courbatures, myalgies, crampes

Douleurs névralgiques

Phase chaude d’algodystrophie

Hyperuricémie, traitement et prévention de la crise de goutte

Cellulite, rétention d’eau, accompagnement des régimes amincissants, œdèmes 

Congestion pelvienne

Inflammation des muqueuses digestives (bouche, œsophage, estomac, intestin)

Fièvres, syndrome grippal

NB : Les racines peuvent être utilisées en cas de diarrhée.

7. Toxicité

Aucun surdosage rapporté.

Absence de toxicité selon l’EMA dans des conditions d’usage normal.

En cas de prise concomitante avec du Paracétamol, possible néphrotoxicité.

8. Contre-indications 

Allergie, hypersensibilité aux dérivés salicylés (aspirine) et aux substances actives.

Allergie à d’autres anti-inflammatoires (ATCD œdème de Quincke, urticaire chronique).

Asthme déclenché par l’aspirine, syndrome de Widal.

Néphrite.

La Reine des Prés est déconseillée chez les enfants fiévreux, chez la femme enceinte ou allaitante et chez les enfants de moins de 18 ans.

9. Effets indésirables

Allergie

Rares troubles gastro-intestinaux ou saignements. La forte teneur en tanins a un effet protecteur des muqueuses et des vaisseaux sanguins.

10. Précautions d’emploi et interactions médicamenteuses

Eviter l’alcool.

Prise à distance des repas et des médicaments.

Risque théorique d’interaction avec les anti-coagulants, l’aspirine et les anti-inflammatoires non stéroïdiens, l’héparine.

Surveillance de l’INR en cas de prise d’anti-coagulants.

11. Exemples d’associations pertinentes (liste non exhaustive)

Selon les effets recherchés, la Reine des Prés s’associe bien avec le saule, la scrofulaire, la réglisse, le millepertuis, la prêle, l’ortie, le frêne, la valériane, la vigne rouge ou encore le cassis…

Le Dr Valnet préconisait une « infusion diurétique éliminatrice d’acide urique » composée de 50g des sommités fleuries de Reine des Prés + 50g de feuilles de frêne + 100g de feuilles de cassis : 1 cuillère à soupe par tasse.

12. Formes d’utilisation

Infusion : 2 cuillères à café bien pleines pour 150ml d’eau (laisser infuser 10 min dans une eau chauffée à 85°C, ne pas faire bouillir la Reine des Prés) : 1 à 4 tasses pas jour

Gélules, comprimés d’extrait sec ou d’extrait standardisé de plante fraîche ou poudre

Teinture : 20 à 30 gouttes 2 à 3 fois par jour

Extrait fluide de plante fraîche standardisé

Suspension intégrale de plante fraîche

Extrait aqueux (ampoule)

Extrait fluide glycériné miellé

En usage externe : compresse chaude, feuilles fraiches

13.Recette du dentifrice à la Reine des Prés

Faire une infusion de Sommités fleuries de Reine des Prés : 1 cuillère à café pour 75ml (ne pas faire bouillir l’eau, laisser infuser 10min dans 1 eau à 85°C). Laisser refroidir.

Puis mélanger 2 cuillères à soupe de l’infusion avec de l’argile blanche. La quantité d’argile blanche sera à adapter selon vos préférences de consistance. Si vous souhaitez une pate épaisse, 1 cuillère café bombée devrait suffire. Pour une consistance plus liquide, 1 demi cuillère à café d’argile blanche.

La préparation se conserve quelques jours. Vous pouvez rajouter 1 goutte d’huile essentielle de menthe ou de citron (facultatif). Effectuez un brossage doux avec une brosse à dent souple.

14. Avant de ramasser et de consommer une plante, il est important de bien la connaître et de savoir comment la reconnaître. La cueillette doit être raisonnable et raisonnée.

 

Sources :

Le Grand Manuel de Phytothérapie. Dr Eric Lorrain, Editions Dunod

https://www.wikiphyto.org/wiki/Reine_des_pr%C3%A9s

https://www.altheaprovence.com/reine-des-pres-filipendula-ulmaria/

Se soigner par les plantes, Dr Gilles Corjon, Editions Jean Paul Gisserot

La phytothérapie, se soigner par les plantes. Dr Jean Valnet.